On est ainsi amené à distinguer trois paradigmes dont on a résumé les traits principaux sur la figure 3. Les premier, qui correspond à l'approche de la science mécaniste empirico-analytique actuellement dominante, est basé sur le présupposé de la séparabilité sujet-objet, donc sur l'existence d'une réalité extérieure dont il est possible de faire une théorie. Son efficacité sera mesurée par sa capacité prédictive. Cette approche est adéquate dans les cas où l'on peut bien séparer les objets, par exemple observateur et observé comme en mécanique classique.
Le deuxième paradigme, que l'on peut qualifier de cybernétique, reconnait la prédominance de la relation, particulièrement de la relation circulaire. Il est indispensable dans l'étude des systèmes complexes, donc fortement interactifs comme par exemple les systèmes écologiques, économiques ou sociaux. Dans ces cas la validation du schéma relationnel proposé par le modélisateur est souvent très laborieuse voire impossible. Ces "modèles" n'accèdent en général pas au statut de "théorie" comme c'est le cas dans le cas des systèmes plus simples, dont s'occupent les sciences de l'inorganique. La portée des modèles cybernétiques devrait être limitée à l'aide à la décision.
Un autre mode, holistique, est nécessaire dans les cas de non-séparabilité manifeste, où il est impossible de séparer sujet et objet. La mécanique quantique nous a habitué depuis une cinquantaine d'années à l'impossibilité en microphysique de séparer observateur et observé. Il est probable que les sciences humaines feront un saut qualitatif quand le couplage entre le modélisateur et le modélisé sera inclus dans le modèle. Les paradoxes de l'autoréférence ne sont pas intelligibles par une épistémologie objectale ni même par une épistémologie relationnelle. Nous sommes persuadés que l'accès au mode holistique implique le remplacement de la modélisation par l'implication, la responsabilisation et l'extension du champ de conscience.